« Jusqu’à mes trente ans, chaque fois que je pourrai j’échapperai à la peinture. On s’enfuit. Rien ne prépare le peintre à la solitude. Il a fait son apprentissage entouré de camarades. Or un jour, il lui faudra entrer en cellule », affirmait Pierre Alechinsky dans Peintures et écrits (Yves Rivière éditeur, 1977). Toute son œuvre, univers de papiers construits, collés, assemblés, de papiers anciens assourdissants d’une actualité périmée, passe de l’image au texte d’une même encre. Tout son vocabulaire est sorti de cet océan noctambule. Et d’un trait, d’une tache, d’une coulée, l’artiste dit qui il est, d’où il vient et où, immanquablement, notre regard nous conduira au-delà de sa nuit d’encre. Puisant dans l’important corpus de dessins offerts par l’artiste aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique entre 1973 et 2021, Carta canta, qui accompagne l’exposition éponyme, révèle toute l’originalité de l’œuvre sur papier de Pierre Alechinsky, depuis les premières gravures jusqu’à ses plus récentes encres et acryliques. Une énergie inaltérable qui, depuis 1948, fait véritablement chanter le papier.