La Révolution numérique a bouleversé les conditions dans lesquelles l’Etat exerce ses prérogatives régaliennes sur son territoire, garantit les droits et libertés protégés par sa Constitution, défend la sécurité de ses citoyens et favorise le développement économique. Elle bouscule les modalités selon lesquelles le peuple, par l’intermédiaire du pouvoir politique qu’il désigne, par le moyen des lois qui sont élaborées en son nom, entend conserver la maîtrise de son destin. Elle modifie aussi la façon dont les individus interagissent et exercent leurs activités et leurs libertés.
Alors que le concept classique, en droit constitutionnel, de la souveraineté se trouve ainsi mis à l’épreuve, certains Etats revendiquent une souveraineté numérique présentée comme nécessaire à la défense de leurs intérêts fondamentaux. Ces préoccupations s’accentuent à raison des failles du système de gouvernance des espaces numériques, de la recrudescence des menaces sur la sécurité, de l’exploitation croissante des données personnelles, de la montée en puissance de multinationales qui s’imposent sans partage sur le terrain de la nouvelle économie. Mais le concept de souveraineté numérique, dans ses dimensions multiples, juridique et technique, collective et individuelle, étatique, européenne et internationale, reçoit bien d’autres acceptions et soulève des enjeux divers, pour les Etats, les individus, les acteurs économiques, les utilisateurs.
Issu de travaux réalisés sous l’égide de l’Association Française de Droit Constitutionnel, le présent ouvrage confronte, dans une perspective pluridisciplinaire mêlant le droit, l’économie et la philosophie, les points de vue de chercheurs universitaires et de spécialistes du monde numérique. Il vise à interroger un concept naissant, sans parti-pris ni a
priori, afin de contribuer à en dessiner les contours, à en identifier les fondements, à en comprendre les enjeux et, le cas échéant, à en reconnaître les limites.