"C'est avec consternation que l'on découvre le bilan des incidents suite à la rencontre entre le Masry SC et le club Al Ahly du Caire: 73 morts et un millier de blessés. Pourtant, il serait trop facile de se contenter des lieux communs suite à ce genre de catastrophe en marge d'une rencontre de football. Ce n'est pas un hasard si les supporters du club cairote d'Al Ahly en sont les victimes. En effet, dès le 25 janvier 2011, lors des manifestations de masse qui ont vu l'éviction du président égyptien Hosni Moubarak, les supporters les plus radicaux d'Al Alhy, connus sous le nom d'UltrasAhlawy ainsi que leurs rivaux du Caire du club du Zamalek, les White Knight ont été parmi les premiers à se mobiliser en masse contre le régime.
De par leur capacité de mobilisation et l'aversion des Ultraségyptiens pour le pouvoir sclérosé du président Moubarak, ils ont réussi à faire un front commun et à abandonner pour un temps leur rivalité pour affronter les sbires du régime. De par leur mobilisation, leur capacité d'action, leur technique chorale mais surtout leur "savoir-faire" dans les techniques de guérilla urbaine, ces derniers ont participé à l'éviction du gouvernement. Depuis lors, ils ont continué à mobiliser leurs partisans et à narguer les services de sécurité. Il est évident que le nouveau pouvoir, qui n'est qu'une continuité de l'ancien régime, ne peut tolérer de telles manifestations de la part de ces éléments radicaux qu'il ne parvient pas à maîtriser.
Les codes et les pratiques des Ultras égyptiens leur viennent d'Italie. Le berceau de la sous-culture Ultrasreste un modèle, en témoignent les méthodologies, les symboles et les slogans que l'on retrouve dans les tribunes occupées par les Ultraségyptiens.
Hier, délibérément, le pouvoir égyptien a laissé faire, en incitant une partie des supporters du Masry Scà provoquer les Ultrasd'Al Alhy pour ensuite créer une situation explosive. Les forces de l'ordre égyptiennes ont semble-t-il laissé faire pour mieux reprendre en main le pays et profiter de cette situation troublée pour imposer un pouvoir fort.
Pourtant, les signes avant-coureurs étaient là, plusieurs rencontres ont été émaillées d'incidents graves, notamment lors de la rencontre de la Ligue des champions d'Afrique entreZamalek etle Club Africain de Tunis. D'autres villes, comme Alexandrie, ont connu des troubles similaires lors du match contre Wadi Degla. Á chaque occasion, un grand nombre de supporters ont été blessés. La répétition et la gravité de ces troubles étaient un avertissement.C'est plus qu'une négligence coupable de la part des autorités égyptiennes."
Sébastien Louis
Docteur en Histoire Contemporaine
Spécialiste des groupes de supporters radicaux
Enseignant-vacataire auprès de l'Université du Luxembourg